Ruminons la ville

Ancien village champêtre dévolu aux cultures maraîchères, Bagnolet fut pendant longtemps un jardin pour les habitants de Paris. La forte demande de logements à la sortie de la seconde guerre mondiale a concouru à l’urbanisation rapide de cette commune. Les grands ensembles du quartier des Malassis, typiques de l’urbanisation de l’époque, se sont pour la plupart dressés sur le plateau à partir des années 60. Plus récemment, le constat est fait que la pression foncière associée à la captation de nouveaux actifs issus des classes moyennes supérieures tend à reléguer au second plan les populations les plus fragiles. C’est dans ce cadre que l’association « Sors de terre », localisée dans le quartier des Malassis depuis plus de trois ans, souhaite faire valoir le vivre ensemble et fédérer la diversité des habitants autour de pôles attractifs à même de redynamiser et de valoriser le quartier.

Les lieux où se déroulent les actions de l’association « Sors de terre » sont des espaces verts ouverts perçus négativement par la population. L’enjeu est de valoriser ces différents espaces libres pour en faire des lieux de rencontre et de détente ouvert à tous dans un contexte de forte densité de population. Il s’agit également de répondre à un désir des habitants d’amélioration et d’embellissement de leur cadre de vie. « Sors de terre » souhaite agir au carrefour de différentes problématiques sociales, environnementales et démocratiques. L’idée portée par l’association est d’initier un lien entre ces différents aspects afin de permettre à terme de faciliter l’engagement participatif au sein du quartier des personnes isolées ou à l’écart des processus institutionnels.

Une action ponctuelle à l’origine du projet

« Sors de terre » a proposé à la mairie de Bagnolet l’idée de faire pâturer des pelouses de pied d’immeuble et des terrains des parcs municipaux par un petit troupeau d’ovins et de caprins. L’animal permet de faire ce que l’association faisait déjà avec le jardinage, le paysagisme et l’auto-construction, et le permettra avec d’autant plus d’impact sur le paysage et les relations sociales entretenues entre les habitants.

Le projet  » Ruminons la ville  » a pour objectif d’aller au delà de la simple action ponctuelle et de courte durée, afin de mettre en place un véritable projet de quartier animant des actions tout au long de l’année et extensible dans l’espace. Il s’agit plus précisément de :
–  » Ruminer la ville  » à savoir, trouver un mode de co-construction du paysage et de la ville qui prenne en compte divers points de vue.
– Créer une relation entre les habitants et les professionnels de l’aménagement du territoire afin de confronter les discours et amener de nouvelles pratiques chez les uns et chez l’autre.
– Comprendre les relations entre les habitants et leur quartier, ce qui suppose d’adopter une attitude d’observation participante.
– Transformer le quartier des Malassis, opérer des changements doux et progressifs.

Les actions prévues

Des actions de sensibilisation seront conduites à la Bergerie qui jouera un rôle majeur

Grâce à sa capacité à accueillir les animaux, les bénévoles, les enfants des écoles voisines ainsi que les promeneurs. A titre d’exemple : mise en place d’un centre de documentation, d’ateliers pédagogiques, projection de documentaires Le lien avec les habitants sera favorisé par l’itinérance du troupeau qui favorisera la rencontre et la discussion. La biodiversité botanique des prés sera valorisée par un réensemencement avec des plantes fourragères. Le projet de pâturage en tant que tel servira de support pour de nombreuses activités avec les habitants via le réensemencement, des ballades pour découvrir les prairies fourragères

Du fait de l’originalité du projet, introduire des animaux pour pâturer des espaces libres en ville, un travail amont a dû être engagé à la fois auprès des services des espaces verts de la ville ainsi qu’avec les habitants afin de leur expliquer le projet.

La concertation avec les acteurs pour prendre en compte tous les usages et les usagers des espaces où le troupeau p ture sera animée via différents outils innovants :
– La réalisation d’une maquette reprenant la carte des pâturages sera le support de ces discussions. Des séances d’échanges collectifs ponctueront ce travail et constitueront des étapes de validation des différentes suggestions.
– Des outils de récolte des points de vue tel que des parcours commentés seront réalisés avec les acteurs (habitants, employés des services espaces verts, élus…) du projet. Cela consiste à accompagner une personne au cours d’une promenade et de la faire parler sur ce qu’elle ressent, l’aspect promenade permettant de lui faire exprimer des choses différentes que lors d’un entretien plus formel.
– Une structure accueillant de grandes feuilles de dessin sera régulièrement mise à disposition de façon à recueillir les dessins d’enfants. Plusieurs ateliers déjà réalisés ont montré l’intérêt et la qualité, en termes de sens autant que d’esthétique, de ces dessins.

Tous ces outils de concertation placent donc l’action et le terrain au cœur de leur démarche. Par ailleurs, leurs dimensions créatives et artistiques serviront de point de départ à la valorisation et à la présentation du projet.