Pays Berry Saint Amandois

Médiation autour du paysage pour des actions concertées entre agriculteurs et habitants

Enjeu : un contexte local sous tension, le bocage objet de conflit en Pays Berry Saint Amandois

Le Pays du Berry Saint Amandois est couvert en majeure partie par un paysage typique de bocage. La combinaison de divers éléments : haies, prairies, cultures, relief, habitat dispersé, petites rivières confèrent une ambiance retirée, champêtre, propice au tourisme vert. Cependant, les témoignages des élus et des acteurs locaux montrent que l’un des principaux problèmes en matière paysagère est relatif à l’ouverture ou la fermeture des paysages.

Ce paysage bocager est à l’origine de conflit et d’affront tant il constitue un élément emblématique et identitaire du Pays pour les uns, un bien patrimonial privé, tributaire des systèmes économiques pour d’autres. Cette problématique du paysage suscite la mobilisation des acteurs de la gestion du Paysage. Suite à des plaintes formulées par des habitants sur la destruction du bocage « qualifiée d’abusive »
M. le sous-préfet de Saint Amand Montrond convoque des représentants des associations de défense de l’environnement, d’élus, d’usagers, d’ayants droit et des agriculteurs concernés par la gestion du paysage sur le territoire du Pays Berry Saint Amandois. Un groupe de dialogue et de réflexion émerge pour répondre au problème de l’avenir des paysages du Pays Berry Saint Amandois.

Au-delà de l’analyse et du diagnostic partagé de la situation, résultant d’un travail préalable entre agriculteurs et environnementalistes, plusieurs propositions d’actions sont ainsi initiées et présentées dans le cadre du programme du contrat de pays Berry Saint Amandois : des propositions relatives au développement d’opérations pilotes de gestion concertée du paysage, issues de la concertation au sein de la commission environnement du conseil de développement du Pays.

Les Ambitions de la charte du Pays : « Maîtriser l’évolution des paysages du Pays » (travaux de la commission environnement du conseil de développement du Pays)

La sensibilité du Comité Agricole de Pays aux sollicitations socio-environnementales grandissantes et sa participation dans les commissions « vie économique » et « environnement et cadre de vie » du conseil de développement du Pays Berry Saint Amandois.

Concernant les agriculteurs participants à la démarche, l’enjeu autour de l’avenir des paysages réside essentiellement dans leurs capacités à pouvoir intervenir dans un futur proche, sur l’aménagement du territoire, sans déclencher une levée de bouclier de la sphère des associations environnementalistes. A savoir, permettre l’agrandissement de petites parcelles sur certaines zones en proie à la déprise ou réaménager sur certains secteurs, des alignements d’arbres ou des écrans visuels paysagers sur les abords d’exploitation

Du coté des environnementalistes, la préoccupation est centrée sur la nécessité de rencontrer et mieux connaître les agriculteurs pour comprendre leur pratiques et leurs logiques de fonctionnement, voire appréhender le système économique d’une exploitation pour entreprendre une action commune viable et vivable pour chaque famille d’acteurs présente sur le territoire, conscients du fait que l’agriculteur « propriétaire et gestionnaire des espaces agricoles » représente le porteur de projet de choix, d’une action d’aménagement, d’amélioration ou de préservation du paysage.

Les objectifs

– Créer la concertation sur des sujets d’affrontement et de conflits en dépassionnant les débats…
– Améliorer le dialogue territorial entre acteurs du paysage et de l’espace rural en partageant un diagnostic commun.
– Proposer et développer des actions dans le cadre du contrat régional de Pays du Berry Saint Amandois en valorisant par la même occasion, l’image du Pays et de son patrimoine environnemental.
Favoriser l’émergence de nouveaux projets individuels et collectifs visant la gestion concertée et l’intégration paysagère, en permettant le travail conjoint des acteurs de la commission environnement et de la commission vie économique dont le Comité Agricole de Pays du conseil de développement du Pays.

Les étapes

– 2004 ; 2005 : Un cycle de co-formation : 5 journées avec l’appui d’un médiateur externe, mobilisation et animation d’un cycle de rencontres basé sur la médiation et le diagnostic partagé, à partir d’exemples concrets, aboutissant à la constitution d’un Groupe d’Action Conseil Paysage
– 2005 ; 2006 : Affinage du diagnostic partagé en 10 séquences de travail collectives. Expérimentation d’actions visant la promotion de la gestion concertée au travers d’un échange du groupe avec des acteurs du territoire en situation de conflit pour trouver ensemble des moyens de régulation.
– 2006 – 2007 : Expérimentation des acteurs locaux autour d’expériences pilotes : 6 séquences collectives. Initiation d’opérations de valorisation « concours, journée à thème, route du paysage… » et proposition d’action pour le projet de territoire « contrat de pays, aménagement foncier, diagnostic environnemental… ». Retour sur le travail engagé et suivi des concertations : 5 séquences entre agriculteurs
– 2007 – 2008 : Décryptage des expériences de dialogue territorial auxquelles chacun des agriculteurs a participé et renouvellement des concertations avec le Pays autour de nouvelles propositions pour accompagner les actions de développement autour du paysage dans le cadre du bilan mi parcours du contrat de Pays et du programme Leader
– Mutualisation des expériences « points forts et points de blocage »,
– Suivi des actions et rédaction des cahiers des charges pour chaque action
– Mobilisation des acteurs locaux et préparation de séquence de démonstration

Comment le dialogue s’est engagé

Co-formation, diagnostic partagé, travaux de groupe, travaux à thème, travaux sur les représentations et développement de projets suivant une stratégie par objectifs, ont constitué les outils de base pour engager et développer un processus de dialogue territorial. L’animateur jouant plus le rôle de facilitateur, voire de chef d’orchestre et de garant dans l’articulation des étapes, la formalisation des travaux, ainsi que dans la validation collective des résultats

Les mécanismes de mobilisation ont largement été catalysés par le premier courrier d’invitation émanant de Monsieur le sous Préfet de Saint Amand, souhaitant voir autour de la table l’ensemble des acteurs du paysage et la mission d’autorité confiée de fait aux protagonistes de travailler sur des propositions et des pistes d’actions, avec l’appui de la Chambre d’Agriculture en qualité d’animateur du dispositif.

L’essentiel de la mobilisation dans le temps de la démarche a consisté à associer les forces vives du territoire sur le thème environnement présentes au sein du conseil de développement, du Comité Agricole de Pays, sous la forme de cooptation, de connaissance ou d’intérêt.

Les partenaires

  • La Chambre d’Agriculture du Cher (support animation, organisation de la démarche, formation)
  • Le Comité Agricole de Pays et le Syndicat de Pays Berry Saint Amandois via la commission environnement du conseil de développement
  • Les acteurs locaux, agriculteurs, environnementalistes, élus locaux…intéressés sur ce thème ou mobilisés ponctuellement sur une étude de cas ou pour une présentation (participation enseignements, visite)
  • La Fondation de France, l’Europe, Vivea, le Ministère de l’agriculture
  • Participants : Agriculteurs du Comité Agricole de Pays Berry Saint Amandois, Arbres et bocage du Berry, Association de Protection de l’Environnement du Boischaut, élus locaux de la commission environnement du Pays Berry Saint Amandois, LPO, Fédération des Chasseurs, Fédération des Exploitants Agricoles, Conservatoire du Patrimoine Naturel, Association Chasse et Terroirs petit gibier, Fédération des pêcheurs, Nature 18, services de l’Etat maître d’œuvre sous couvert de la Sous Préfecture.

Les résultats

– pour les agriculteurs

Des agriculteurs sensibilisés qui ont noué des contacts entre eux, développé de nouveaux liens, évolué dans leurs représentations, voire perçu l’intérêt de s’impliquer dans les instances de dialogue territorial, mais aussi progressé sur la dimension technique et agro-environnementale.

Des pistes de gestion simples et adaptées aux situations étudiées, utiles pour les porteurs de projet au fil des diagnostics partagés sur site, (taille des haies, gestion des fossés, aménagement parcelles, chemins)

Des formations et des aides mises en place en faveur des projets améliorant la qualité de l’environnement dans le cadre du contrat de pays et de l’appel à projet leader. (Plantation, intégration paysagère, restauration patrimoniale, filière bois-énergie)

– pour le territoire

Des opérations de valorisation : les acteurs locaux se retrouvent fédérés autour d’un projet de territoire (Rallye découverte paysage, randonnées ballade paysage)

Un concours pour faire connaître les initiatives et les projets de dialogue territorial réalisés près de chez soi (Mon paysage pour le Pays en collaboration avec un collège)

Une route du paysage, outil complémentaire, touristique, économique et socioculturel pour le Pays (valorisation de 33 sites avec préparation et mise en œuvre de panneaux d’interprétation du paysage)

Un environnement mieux connu, des échanges à tous les niveaux entre acteurs du Pays d’horizons divers (échanges facilités entre associations de protection de la nature et les agriculteurs non participant à la démarche, du fait du discours et de l’approche plus sereine et moins passionnée résultant du travail de communication)

Amélioration et prise en compte d’une conscience paysagère grandissante au sein du pays et des projets en cours de réalisation.

– pour les autres partenaires

Compréhension des enjeux et des problématiques de chacun au travers d’un désenclavement des mentalités
Des accords, des compromis, une charte de bonnes pratiques, des engagements, voire des conventions de gestion établies.
Un conseil municipal qui partage le diagnostic réalisé avec l’appui du Groupe d’Action Conseil Paysage, la commission territoire et les élus du Pays Berry Saint Amandois
Un travail de fond appréhendé et une mise en lien des acteurs autour de l’intérêt, des incidences et de l’impact de la mise en œuvre d’une opération de restructuration foncière sur une commune étudiée
Des connexions facilitées, des habitudes et des synergies établies pour assurer l’émergence et le développement de nouveaux projets (mise en place de partenariats parallèles entre certains participants qui ont fait connaissance dans le cadre de la démarche de concertation comme des travaux matériels ou autres échanges de procédés)

Les facteurs de réussite

L’implication et la motivation globale des participants au sein du groupe au fil du temps sur trois ans autant en leur nom qu’au nom de l’organisme ou de la famille d’acteurs qu’ils représentent, notamment rendues possibles sur le caractère local de la démarche mettant en scène des protagonistes qui ont appris à s’apprécier et à se rendre d’autres services

La reconnaissance des agriculteurs dans leur métier, de la part des élus et des environnementalistes, ainsi que la mutualisation des connaissances et des sensibilités à tous niveaux

L’efficacité des travaux menés en sous groupe conduisant à des réalisations concrètes : « Journées et articles de communication », « action et expérimentation sur le terrain avec des nouveaux partenaires », « rencontre avec des élus sur le territoire », « concours et route des paysages », « aides aux projets d’aménagement et d’intégration paysagère des exploitations », « concertation rurale pour préparer au mieux une opération d’aménagement foncier »,

Une animation sans relâche, préparer à gérer les déconvenues, les découragements, la démobilisation sans perdre le fil conducteur et valoriser, réguler les idées et les initiatives,

Le poids du facteur déclencheur, « convocation par la sous-préfecture » gage d’une mobilisation et du sentiment d’une obligation d’aboutissement.

Les difficultés et les limites

Une démarche d’animation lourde : « faire cohabiter la palabre avec les données objectives et toujours formaliser ensuite par l’écrit » (les comptes rendus, les relevés de décision, les photographies, les enregistrements, les temps de mutualisation)

La mobilisation des participants du groupe sur des travaux individuels ou en sous groupe
« le paradoxe du concret avec la difficulté quant à l’appréciation du concret des travaux menés »
« les rencontres de travail ne peuvent pas se limiter à de l’échange d’expériences ou de la mutualisation.

Elles doivent être motivées et procurer un sentiment d’utilité ou d’avancement Ainsi, la nécessité de présenter des actions dans le cadre du contrat de pays et de la procédure Leader a créé le contexte et prétexte au dialogue territorial

L’implication parfois difficile des agriculteurs du territoire en amont des projets, lors des travaux
de concertation : comment éviter qu’on se sente impliqué « seulement par son propre cas », comment prendre en compte les dimensions non productives : abords d’exploitation, paysage, lien social et culture historique considérée souvent comme marginale à l’échelle du système d’exploitation ?

L’enjeu de l’évaluation et de la valorisation du travail réalisé « nécessaire pour les financeurs et
indispensable pour les participants » La notion de lisibilité de l’action au quotidien et sur la durée avec les demandes récurrentes de concret des acteurs locaux est un point de vigilance qui demande beaucoup d’attention dans la présentation et la formalisation des travaux réalisés sous peine de tomber sous la coupe de la « réunionite » sans résultats

Quand s’arrêter dans l’accompagnement de l’action ? « marquer un essai mais ne pas se substituer
aux institutions compétentes et se limiter à son rôle d’émergence, de facilitateur en provoquant des synergies, en favorisant la qualité des compétences humaines et en adaptant les raisonnements aux valeurs de l’époque « développement durable, gestion concertée,. »

Les suites

Entretenir les liens entre les acteurs au delà de l’opération pour conserver des relations constructives pour favoriser le bien vivre

Informer et inciter les agriculteurs à participer et développer des projets d’intégration paysagère, de plantation, voire de cogestion du territoire avec d’autres acteurs. Notamment dans le cadre des appuis financiers du contrat de pays

Valoriser les expériences de gestion concertée du territoire sur le Saint Amandois et à l’échelle du département

Pérenniser l’existant des actions en cours au travers de l’appropriation du processus de concertation, de son esprit et développer de nouveaux projets multi-acteurs

Quelques informations

  • Type de fiche : Expérience
  • Département concerné :
    18

Structure

  • Chambre d'Agriculture du Cher
  • BP 2701 €“ Route d'Orléans
  • 18230 Saint Doulchard
  •  
  • 02 48 23 04 00