
Préserver les canaux d’irrigation
Citadins, vacanciers, ruraux : comment mobiliser la population ?
La Société Géologique et Minière du Briançonnais est une association loi 1901 gérée par des bénévoles, dont l’objectif est la mise en valeur du petit patrimoine : anciennes mines, anciens moulins, canaux d’irrigation, etc. dans le pays de Briançon en Hautes Alpes. Sur chacun de ces sujets, elle a mis en place des musées, réalisé des expositions, créé des diaporamas et édité des publications.
L’enjeu des canaux
L’eau est un thème majeur de l’activité de l’association qui de ce fait a d’étroites relations avec les associations (les ASA ou Associations Syndicales Autorisées) qui gèrent les canaux d’irrigation. 14 ASA gèrent encore 80 km de canaux sur le territoire concerné.
Ces canaux sont tous à ciel ouvert (irrigation gravitaire).
De nombreux enjeux économiques sont liés à ces canaux dont la plupart datent du XIV ° siècle :
– ils sont d’abord une source d’eau bon marché pour leurs riverains,
– ils alimentent les nappes phréatiques en eau naturellement épurée et joue le rôle de temporisateurs de crues en captant une bonne partie des eaux de ruissellement.
– ils sont un lieu d’entraînement pour les sportifs et en particulier les adeptes du jogging et les Vététistes, qui préfèrent courir ou circuler le long des canaux que le long des routes goudronnées envahies de voitures,
– ils peuvent rapidement devenir des lieux de promenade pour les personnes âgées, de plus en plus nombreuses, en raison de leur faible pente, de leur parcours en forêt et de la présence de l’eau, et constituent de ce fait un atout touristique majeur.
– en période de sécheresse, ils assurent le maintien d’une végétation spécifique sur leurs berges.
– Ce sont enfin des éléments intéressants du patrimoine rural.
Les conflits d’usage
Mais l’augmentation et la diversité des usagers entraînent quelques conflits :
– les canaux sont utilisés à des fins touristiques ou sportifs sans concertation avec les associations gérantes qui supportent de plus en plus difficilement cette situation,
– une population plus citadine s’est installée le long des berges des canaux et utilise l’eau pour une fonction plus ludique ; arrosage des jardins, pelouses, piscine, etc. sans tenir compte des règles existantes ni des usagers en aval,
– la situation juridique des canaux reste complexe avec en particulier une servitude de passage pour les personnes en charge de l’entretien. Elle devient mal adaptée à l’utilisation de plus en plus ludique de la ressource hydrique.
– les nouvelles lois sur l’eau, et en particulier le principe « préleveur-payeur », sont mal adaptées à ce type d’irrigation dans laquelle moins de 20% de l’eau prélevée est utilisée par les plantes.
La démarche
Dans le cadre du projet aidé par la Fondation de France, l’association a réalisé les actions suivantes :
– une Table Ronde le 24 octobre 2003. Cette manifestation qui réunissait responsables des ASA, juristes spécialisés, Agence de l’eau, acteurs du Tourisme, association de Vététistes, a été le facteur déclenchant d’une prise de conscience sur l’intérêt de ces canaux. Des vocations sont nées ce jour là.
– mise à disposition gratuite des actes de cette Table Ronde sur le site de l’association http://www.sgmb.fr
– édition à 5.000 exemplaires d’un prospectus intitulé « gérons ensemble les canaux du Briançonnais » dont la fonction était de définir, de manière didactique, les droits et devoirs des arrosants. Le vif succès recueilli par ce document a nécessité un retirage de 2.000 exemplaires. Depuis, les ASA elles-mêmes assurent retirage et la diffusion.
– réalisation d’une exposition de 11 panneaux sur les canaux du Briançonnais.
Les résultats
Au total, ce travail a contribué très largement à une remise en ordre du fonctionnement des ASA et à une sensibilisation du public et des institutions au maintien de ces structures.
Actuellement, l’association procède à l’édition en quadrichromie d’un ouvrage de synthèse sur le sujet.