Agriculteurs et naturalistes de la Piège

Une expérience de concertation environnementale suite à un conflit provoqué par un projet de mise en place d'une zone Natura 2000.

La concertation mise en œuvre dans la Piège (région rurale de l’ouest du département de l’Aude) à partir de 2006 naît à la suite d’un conflit opposant, d’un côté des naturalistes de la LPO de l’Aude (Ligue pour la protection des oiseaux) et l’Etat, de l’autre des agriculteurs et des élus locaux à propos de la mise en œuvre d’une zone Natura 2000 dans le but de préserver l’habitat d’oiseaux, notamment de rapaces comme l’Aigle botté. Mise en place sur la suggestion de la LPO de l’Aude sans réelle concertation avec la population locale, ce projet est considéré comme une menace par les agriculteurs, une négation de leur avis qui n’a jamais été sollicité et un manque de reconnaissance de leurs efforts en matière de protection de l’environnement.

Une concertation qui naît d’un conflit

Pour s’opposer à ce projet, l’association TERRE est créée, composée principalement d’agriculteurs, appuyés par les élus locaux et par la Fédération Départementale des Chasseurs. Les premiers échanges sont très tendus. Puis, notamment Grâce à la médiation de chargés de mission et à la volonté de quelques élus de la Chambre d’Agriculture, le dialogue se restaure progressivement. Le tournant véritable survient lorsque, lors d’une réunion publique, la LPO reconnaît sa maladresse et accepte de revenir en arrière. Le champ est alors ouvert pour que s’engage une concertation entre agriculteurs et naturalistes en vue de préserver les oiseaux, en dehors du cadre Natura 2000.
Cependant, une fois enclenchée la « mécanique » administrative de mise en place de la zone Natura 2000, il s’avère difficile de revenir en arrière. Poussée par le Ministère, l’administration temporise mais refuse d’annuler la procédure. La réalisation du Document d’objectif, qui suppose une concertation étroite entre acteurs locaux et administration, est seulement repoussée de quelques années. Cette rigidité crée une fracture entre la population locale et l’administration.

Par contre, la concertation se poursuit sur le terrain entre les protagonistes de la première heure, afin de définir quel contenu donner aux mesures devant permettre de préserver la biodiversité. La concertation est animée par la Chambre d’Agriculture de l’Aude.

Elle s’organise formellement autour du Comité de pilotage créé pour l’occasion, mais les accords sont préparés lors de réunions techniques et de contacts informel. La proposition consiste en une observation détaillée de fermes-pilotes par les naturalistes de la LPO, puis à la formulation de propositions concernant des pratiques à proposer aux exploitants et permettant d’établir une charte des « pratiques volontaires pour la biodiversité ». Le comité de pilotage joue cependant un rôle certain puisque c’est lui qui validera les propositions techniques qui seront issues des fermes pilotes et qui autorisera leur diffusion.

D’autres lieux de dialogue ont joué un rôle important dans l’évolution du conflit, notamment les réunions des GDA (Groupes de développement agricole) qui ont constitué des relais d’information entre les responsables directement impliqués dans la concertation et l’ensemble des agriculteurs du territoire.

Les points forts de l’expérience audoise

– La capacité à dépasser le conflit. La capacité des responsables agricoles et des élus locaux à dépasser le conflit pour s’engager dans la voie du dialogue est assez remarquable dans l’expérience de la Piège. Quelle est la part de la culture du dialogue dont se réclament les acteurs locaux ? Quelle est la part du calcul stratégique ? Qu’est-ce qui est dû à une influence de l’environnement départemental, par exemple l’antériorité de la relation entre naturalistes et agriculteurs dans d’autres parties du département ?

– Dynamisme et cohésion du monde agricole. La Piège se distingue d’autres régions du département par le dynamisme de ses organisations collectives, notamment les GDA qui regroupent une fraction significative du monde agricole. La forte assistance aux réunions, l’efficacité des relais que constituent les élus agricoles et les conseillers de la Chambre d’Agriculture, le sentiment identitaire local : tous ces éléments ont largement contribué à une transmission d’information et à une mobilisation efficace de l’ensemble des agriculteurs.

Quelques informations

  • Type de fiche : Expérience
  • Année de début d'expérience :
    2006
  • Département concerné :
    11

Structure

  • Chambre d'Agriculture de l'Aude
  • ZA de Sautes à Trèbes
  • 11878 Carcassonne cedex 9

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