Vers une gestion partagée du site de Kério

Une expérience dans les Côtes d'Armor

Massif atypique dans un paysage plutôt tourné vers l’agriculture intensive, le site de Kério est un petit plateau de zone humide. Il fût un temps où les vaches et moutons pâturaient sur ces landes situées à une quinzaine de kilomètres de la côté. Mais la qualité très pauvre de ces terres a convaincu les éleveurs à se tourner vers d’autres pâturages. Petit à petit, la nature a repris ses droits et Kério est aujourd’hui recouvert d’une végétation arbustive.

Situé en zone bocagère, cet espace naturel couvre une surface de 160 hectares, à la jonction entre trois communes des Côtes d’Armor :  Tréguidel, Tressignaux et Pléguien. Ce lieu correspond au périmètre de protection rapprochée de la ressource en eau potable de la Communauté de Communes de Lanvollon-Plouha. Les eaux souterraines captées par les quatre forages à une centaine de mètres de profondeur sont de très bonne qualité : elles sont vierges de tout nitrate et sans la moindre trace de pesticides. Fin 2006, une station de pompage et de traitement des eaux a été construite à Kério. Pomper l’eau en profondeur s’avérait en effet moins onéreux que de dépolluer les eaux issus des terrains alentours.

Malgré cette eau reconnue de qualité, les changements de pratiques en terme d’occupation de ces terres, anciennement des landes, ont conduit à une certaine détérioration de la qualité et de la quantité d’eau produite sur ce site. En outre, les zones de milieu ouvert se refermant petit à petit par manque d’entretien, cela risque d’entraîner à terme une homogénéisation du milieu. Voire la disparition de certaines espèces vivant dans les milieux ouverts.

 

La concertation pour anticiper les conflits

Cet espace n’est pas uniquement dédié à la production d’eau potable. Il sert de support à des activités de production agricole et forestière. Une paysanne boulangère en agriculture biologique est en effet installée, en partie, sur des terres du site de Kério. De multiples activités de loisir s’y déroulent également : randonnées, chasse, sorties d’éducation à l’environnement, pratique du quad…

Une multiplicité d’enjeux qui fait face à une multiplicité d’usages et d’activités. Pour anticiper de potentiels conflits entre acteurs et pour valoriser au mieux ce site remarquable, des élus locaux du territoire de la Communauté de Communes de Lanvollon-Plouha (CCLP) décident de mettre en place une concertation sur l’usage et la gestion de ce site. Il s’agit par là de définir collectivement des modalités d’utilisation de ce lieu, tout en garantissant la qualité de la ressource en eau. La CCLP fait appel à une association extérieure au territoire, l’AFIP, pour les accompagner dans la mise en place de ce dialogue territorial.

 

Protéger l’eau : sanctuariser ou sensibiliser ?

Dans un premier temps, l’AFIP va à la rencontre de chacun des acteurs concernés par cet espace. Ces rencontres individuelles mettent en évidence trois visions différentes pour le site et sa gestion. Certains souhaitent fermer le site à toute fréquentation, dans l’objectif de protéger le lieu et la qualité de la ressource en eau. D’autres acteurs imaginent un certain périmètre du site ouvert mais correspondant uniquement à leur propre utilisation, sans prendre en compte les besoins des autres. Certains mettent en avant une vision plus globale, prônant une volonté de partage de l’espace entre tous les acteurs, tout en respectant la nécessité de protection de la ressource. Cette ouverture du site au public aurait vocation, selon eux, à sensibiliser les utilisateurs de la zone aux enjeux de la qualité de l’eau.

Ce sont ces trois visions différentes qui sont exposées aux participants lors de la première réunion du comité de pilotage de la démarche, regroupant l’ensemble des usagers du site.

Les échanges entre tous ces acteurs, réunis au sein d’un comité de pilotage, aboutissent ainsi à un premier résultat. Un accord sur une vision partagée de ce site. L’enjeu est de protéger la ressource en eau, mais sans en faire un sanctuaire. Il faut donc organiser la fréquentation du site, afin d’en permettre l’accès au plus grand nombre possible, tout en ayant à l’esprit l’obligation de ne pas impacter négativement la ressource souterraine.

 

Des règles d’utilisation… insuffisamment formalisées

S’en suivent plusieurs réunions de comité de pilotage afin de déterminer, collectivement et à partir des besoins d’utilisation de chacun, des règles pour une gestion et utilisation concertée de ce site. En parallèle des comités de pilotage, certains acteurs réunissent également leurs adhérents, afin de recueillir leurs besoins et de mieux les porter lors des comités de pilotage. C’est le cas notamment pour les chasseurs, dont le site concerne plusieurs fédération locales, n’ayant pas forcément les mêmes habitudes de chasse. Cette démarche leur a permis d’échanger en interne et d’aller vers une harmonisation de leurs propres pratiques.

De façon opérationnelle, des propositions concrètes sont avancées et mises en œuvre sur le site. Cela concerne par exemple une régulation de la circulation sur le lieu (ne pas rouvrir tous les chemins, ne pas baliser…). Mais aussi la mise en place d’un calendrier de fréquentation avec, pas exemple, l’interdiction de la chasse le mercredi, pour permettre la tenue d’activités scolaires et périscolaires. Ou encore la volonté que les personnes venant couper du bois utilisent de l’huile végétale pour leurs tronçonneuses afin de limiter les sources de pollution. Un bâtiment d’accueil du public est même construit, marquant ainsi clairement cette volonté d’ouverture du site.

L’idée initiale de cette initiative était d’arriver à la rédaction d’une charte d’utilisation du site, qui soit un texte de référence sur lequel se baser pour réguler et organiser les accès et activités. Du fait d’un changement de majorité politique au sein de la Communauté de Communes de Lanvollon-Plouha au cours de cette démarche, ce texte n’a toutefois pas pu voir le jour.

 

Il n’en reste pas moins que la démarche de concertation aura permis de statuer sur l’accord, entre l’ensemble des usagers, pour laisser le site ouvert et accessible à tous. Et de définir quelques règles communes quant au partage des temps et de l’espace, afin de permettre le déroulement des différentes activités de façon sereine, tout en garantissant la protection de la ressource en eau.

Quelques informations

  • Type de fiche : Expérience
  • Année de début d'expérience :
    2011
  • Département concerné :
    35

Structure

  • AFIP Bretagne - Cette structure n'est plus en activité

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